Bonus Track : Søren MOSDAL

A propos de Rockworld : 3 questions à Søren MOSDAL

Quelle est la part autobiographique dans les situations et les personnages de Rockworld ?
Les deux personnages principaux sont inspirés de trois personnes différentes. Charley, le type avec les lunettes c’est en fait Jacob Ørsted, le scénariste mais ce n’est pas seulement lui, c’est aussi deux autres types qu’on a incorporés, deux amis, mais je ne suis pas sûr qu’on leur ait encore dit, je ne crois pas qu’il le savent… Mickey, c’est un peu moi y compris pour l’addiction à la bière, j’en ai bien peur (rires) et aussi deux autres amis.Mosdal
Les histoires sont inspirées de toutes sortes de trucs, au départ on essaie toujours de partir sur quelque chose de réel mais après on fait ce qu’on veut.

La Scandinavie est surtout connue pour sa scène Métal. Est-ce le cas au Danemark et quelle est la place de l’Indie Rock dans ton pays ?
Le Métal et le Black Métal, c’est surtout en Norvège. C’est dommage qu’on n’ait pas de groupes de Black Métal vraiment bons au Danemark. Par contre, il y a des groupes d’Indie Rock qui ont vraiment explosé sur la scène internationale, c’est un truc assez nouveau depuis deux ou trois ans, maintenant tout le monde en parle, comme Iceage, ce sont encore des teenagers, et autour d’eux il y a d’autres groupes… C’est vraiment excitant aujourd’hui alors qu’il y a dix ans, il n’y avait pas grand chose.

Tu as un dessin original et très personnel. Quels sont les auteurs qui ont pu t’influencer dans ton travail ?
Merci ! Il y en a beaucoup mais je pense qu’au début quand j’ai commencé à vouloir faire des bandes dessinées, j’ai vraiment regardé Muñoz qui est l’un de mes grands modèles et puis après il y a eu le peintre Egon Schiele. Mais j’ai trop essayé de faire comme eux et ça reste toujours un problème de ne pas les imiter. Mais je crois que je commence à avoir mon propre style. En ce moment, je suis un grand amateur des Pulp italiens, les Fumetti, ces trucs qu’on achète dans les gares avant de prendre le train. Je ne peux pas dire que ça m’inspire mais c’est ce que j’aime lire. J’ai découvert Magnus, qui est mort aujourd’hui, avec Necron qui est pour moi un chef-d’oeuvre.

Rockworld

Dessins : Søren MOSDAL – Textes : Jacob ØRSTED

C’est cool d’écouter du Rock. Ça permet de rester branché, éternellement jeune et tout en rigolant à la lecture dans Télérama (j’assume mon côté obscure) d’une énième interview hagiographique du pseudo patron belge du Rock francophone détaxé, d’avoir la confirmation que l’on appartient définitivement à une élite. Et quand en plus, on a la modeste prétention de tenir un blog sur le sujet, on se lance avec conviction et empathie dans la lecture des péripéties de ces trois cousins danois dont le héros central s’escrime lui aussi sur la toile pour promouvoir le binaire primaire. Au bout de quelques pages, on commence à se raviser sur la pureté et la noblesse de nos intentions. Non, sérieusement, est-ce que par hasard je ressemblerais pas un petit peu à ces trois foireux ?
Rockworld 2Faut dire que ces Pieds-Nickelés scandinazes (allez, celle-là, elle est pour moi, non, vraiment, ça me fait plaisir) forment une belle brochette de fans attardés, entre Charley, l’intello blogueur binoclard à la libido torturée, Mickey, le nabot alcoolique et parasite et Bob, rocker à bananes, adipeux et bas du front.
Charley, quadra célibataire, traîne dans les clubs Rock underground de Copenhague, à la recherche de la perle rare, musicalement et affectivement mais dans les deux domaines, ses démarches s’avèrent assez laborieuses. Sa dégaine de dandy intello le distingue pourtant du lot mais sa timidité et sa naïveté s’avèrent à peine moins handicapantes que la présence encombrante et fortement alcoolisée de ses deux comparses, notamment Mickey, toujours en quête d’un bon plan foireux.
Cette plongée potache dans le milieu de l’Indie Rock danois est prétexte à des situations drolatiques et parfois surréalistes, mettant en scène des personnages déjantés, une faune comme seul le Rock peut en produire. On n’est pas très loin de l’esprit d’un Peter Bagge, dans En route vers Seattle. Le trait acéré de Mosdal brosse des trognes bien freaks, (telle la tronche de mante religieuse de Charley, très réussie) qui servent parfaitement le récit et l’ambiance particulière de ce milieu Rock branché, ici caricaturé avec pas mal de dérision, grâce aux frasques de Mickey et Bob, lourdingues et ingérables.
Rockworld compile des récits parus dans le fanzine Turkey Comix et qui méritaient bien d’être édités dans ce livre à l’aspect sobre et raffiné, comme l’humour qu’il recèle.
Même si cet opus venu du froid sera sans doute plus goûté par un public averti, familier des subtilités du Rock underground, avec ses codes et ses clichés (auxquels il est fait abondamment référence), il pourra tout de même être apprécié en tant que tel pour ce qu’il est avant tout, une BD d’humour offrant une note rafraîchissante et un ton décalé. (Mine de rien, je commence à maîtriser le dialecte Télérama !)

Bonus Track : 3 questions à Søren Mosdal