Kebra

Dessins et textes : TRAMBER et JANO

Kebra est avec Lucien et Les Closh, le troisième membre de ce triumvirat de héros qui marquent l’avènement de la BD Rock en France, dans les pages de Métal Hurlant.
Si l’on devait définir Kebra en quelques mots, on pourrait dire qu’il s’agit d’une version trash de Lucien, un Lucien qui serait passé du côté obscur. Ce serait certes lapidaire mais tout de même suffisamment évocateur.
Car le héros à tête de rat, créé en 1979 par Tramber et Jano a beaucoup de points communs avec le rocker à la banane métallique de Frank Margerin. A l’instar de Lucien, Ricky et consorts, Kebra est un loubard de banlieue qui joue du Rock dans un groupe et vit ses premières aventures dans Métal Hurlant. Il porte la panoplie traditionnelle des rockers éternels : jean, santiags et perfecto. La comparaison s’arrête là. Car si on voit Lucien et ses potes, à leurs débuts, chouraver une mobylette ou se castagner de temps à autre, ils vont vite s’assagir pour devenir des rockers sympathiques, de bons p’tits gars dans le fond.
Kebra et sa bande sont eux de vraies racailles rock’n roll. D’authentiques outlaws qui rackettent les bourgeois, braquent des bureaux de poste et s’attaquent même au Père Noël. De vrais, affreux, sales et méchants, sans aucune morale, que seule surpasse dans la voyouterie la redoutable bande à Kruel. Heureusement que ce dernier existe d’ailleurs car en faisant de Kebra son souffre-douleur il contribue largement à le rendre un tant soit peu sympathique.
Kebra sévit dans une banlieue cradingue, aux immeubles décrépis, aux rues défoncées et jonchées d’immondices. Les auteurs ont choisi de dépeindre la zone dans ses aspects les plus glauques, une jungle où seuls les bad boys arrivent à survivre. Et qui dit jungle dit faune. Le graphisme animalier permet d’affubler les personnages des trognes carnassières, loups, crocos, serpents, rapaces et bien sûrs rats avec Kebra, le héros au regard noir qui lui donne cet air de dément shooté aux amphétamines.
Ajoutés à cela des dialogues fleuris qui pourraient utilement figurer dans un manuel d’argot et de verlan, Kebra ferait presque figure de documentaire sur la banlieue s’il n’y avait cet humour noir et ces récits atomisés où le héros se retrouve dans les situations les plus improbables avec de temps à autres une escapade vers la science-fiction.
Accessoirement, Kebra est chanteur et guitariste du groupe Les Radiations. Du rock graisseux, mâtiné de rock’n roll et de punk, saturé à souhait qui fait assez penser aux Ramones. Et puis il y a ces textes, énormes, dont on regrette qu’il n’aient pas été enregistrés pour de vrai. Mention spéciale pour « Le Rock’n roll me colle aux grolles », véritable manifeste drôlatique de rock premier degré.

Kebra accomplira ses méfaits jusqu’en 1985. Malgré cette courte existence, il aura eu le temps de devenir l’une des références absolues de la BD Rock.

L’interview de Jano, c’est ici

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