A propos de Allegretto Deprimoso, 3 questions à Romain DUTREIX
Les satires d’Allegretto Déprimoso sont aussi drôles que féroces et tapent sur tous les genres musicaux : Un besoin de régler des comptes avec la musique ?
Peut-être, puisque, comme la majeure partie de mes collègues, je suis un musicien raté (ou frustré, si on voulait le dire plus gentiment). C’était donc peut-être une façon de me venger de mon absence de talent dans ce domaine. Plus concrètement, et au risque de tuer un peu le mythe de l’artiste visité par l’inspiration divine, cet album répond à une commande du rédac’chef de Fluide de l’époque, Thierry Tinlot (que je remercie au passage, car c’est grâce à sa persévérance – à me harceler pour que je produise quelque chose – que j’ai fini par travailler pour Fluide). Il m’a dit qu’il voulait quelque chose sur la musique pour Fluide et m’a demandé si j’étais partant. Et comme je suis un musicien raté, ça m’a évidemment intéressé. Le fait que je tape sur tous les genres musicaux faisait partie de mon principe de départ : je voulais faire une série d’histoires courtes (4 pages), en abordant à chaque fois un genre différent et avec à chaque fois une couleur de bichro différente.
Le livre regorge de clins-d’œil et de références à certains grands clichés, « allègrement » tournés en dérision. Le reflet de la grande culture musicale de l’auteur ?
Aha, c’est la question piège ! Si je réponds non, ça me décrédibilise, et si je réponds oui, je passe pour un gros prétentieux !! Disons que je suis très mélomane. J’écoute beaucoup de musique, et le phénomène musical m’intéresse dans sa globalité, et même si tous les genres musicaux ne m’intéressent pas autant les uns que les autres (et de loin), je pense avoir une relativement bonne connaissance générale dans le domaine… Mais ça n’est pas essentiel pour faire un bouquin comme celui-ci : ce qui est essentiel c’est que quand on fait de l’humour on est forcément particulièrement attentif à tout ce qui relève du cliché, du code social, des comportements grégaires, et de toutes ces choses qui sont très répandues dans la musique aujourd’hui. Il n’y a qu’à ouvrir les yeux et regarder comme chaque « tribu » finit par s’auto-caricaturer. Ça n’est pas spécifique à la musique, mais comme en musique c’est particulièrement flagrant, un humoriste peut en faire son miel assez facilement. Une connaissance, même sommaire, de chaque genre musical (et de chaque « tribu » qui compose son public) permet de repérer assez vite les clichés et d’en rire à l’infini. Le simple fait que les goûts musicaux déterminent le style vestimentaire d’une personne est déjà un gag en soi.
Y’a-t-il d’autres artistes ou styles que tu aurais aimé caricaturer et à l’inverse éprouves-tu un tant soit peu de remords à l’égard de certaines de tes victimes ?
Jamais de remords, non ! Des remords quant à la qualité de telle ou telle histoire, oui : telle histoire aurait pu être plus drôle, telle histoire mieux construite. Mais chaque victime n’a que ce qu’elle mérite. En revanche, c’est vrai que certains grands genres musicaux ne sont pas abordés ou alors peut-être pas de façon assez approfondie : le Jazz évidemment, le Hard-Rock, le Goth, l’Indus, le Reggae, la Techno… Il y aurait de quoi faire un deuxième bouquin entier !