Dessins : Marc MALES – Textes : Arnaud LE GOUËFFLEC
En 2014, Cornélius avait édité « Vince Taylor n’existe pas » de Maxime Schmitt et Giacomo Nanni, une BD assez surprenante et originale, une sorte de roman noir très librement inspiré de la vie du plus français des Rockers Anglais.
Il faut dire que le destin de Vince Taylor, le créateur de Brand New Cadillac (reprise par Clash sur l’album London Calling, vous voyez que vous connaissiez…), est fascinant et illustre parfaitement le caractère à la fois sublime et pathétique de ces vies de Rockstars. Adulés par un public masculin prêt à tout casser pour les voir en concert et une cohorte de filles prêtes à tout elles aussi… on garde le même verbe mais on ajoute le verbe faire et on met le tout à la forme pronominale, et ça peut passer sur Facebook, enfin si vous avez pas compris, je simplifie… pour passer une nuit torride avec leur idole avant d’être jetées au petit matin comme des Kleenex usagés. Et en même temps ces bad boys cachent souvent, derrière l’attitude provocante et le flux de décibels, des fêlures secrètes, inavouables et impossibles à combler.
L’intérêt principal de ce biopic romancé est donc d’offrir un réel point de vue d’auteur et de mettre en lumière cette ambiguïté, incarnée par Brian Maurice Holden (le vrai nom de Vince Taylor, ce qui démontre une fois de plus que Maurice est un prénom injustement dévalué dans l’imaginaire Rock) l’inventeur du look du Rocker en vraie peau de vache pour se donner des allures de faux dur à cuir, maintes fois copié depuis, à commencer par Gene Vincent. Au premier abord, le fait que Marc Malès, dessinateur, entre autres, des premiers albums de la série De Silence et de Sang et de Mille Visages ait pris en mains la vie de Vince Taylor pouvait être surprenant, car le reste de son œuvre ne révèlait pas vraiment une attirance particulière pour le Rock’n Roll. Mais en y regardant de plus près, le fait de s’être frotté dans nombre de ses récits au mythe américain, le prédisposait sans doute plus que d’autres à en illustrer, par un noir et blanc intense et soutenu, l’un de ses avatars les plus iconiques et les plus pathétiques.
Les auteurs dépeignent le Rocker comme un mystique, sincèrement croyant, persuadé d’être un Ange Noir, déchu par Dieu et descendu sur terre pour répandre le Chaos, grâce au Rock’n Roll. Incapable d’aimer, assouvissant dans ses relations avec les femmes des instincts maléfiques, sa trajectoire était toute tracée, tant il est vrai que le sommet est un prélude à la chute. Celle-ci s’est amorcée quand Vince Taylor est tombé dans le catalogue d’Eddie Barclay. Au point que le public non averti a pu s’imaginer qu’il soit né de ce côté de la Manche, tel un Eddie Mitchell ou un Johnny Hallyday. Le pauvre…