Dessins et Textes : Christophe BLAIN – Musique : Barbara CARLOTTI
Par un dimanche après-midi pluvieux, énième avatar du mois de mai le plus pourri de mémoire de moi, je glisse le CD dans la platine et j’ouvre le bouquin, en route pour une expérience dont je ne sais trop quoi penser.
J’ai adoré Le Réducteur de vitesse, bien aimé Isaac le Pirate et apprécié Gus. Et j’ai retrouvé dans La Fille ce ton et cette vision qui font de Christophe Blain un auteur unique dans la BD, avec cet art consommé de renouveler à sa manière des thèmes ultra défrichés. Sa Fille n’échappe pas à la règle, belle et rebelle, indépendante et fragile, sensuelle et romantique. L’intrigue revisite mythes et héros hollywoodiens, western, pin-ups et grosses cylindrées, entre violence, érotisme, musique et love-story. Tout cela est de fort bon gout et l’on retrouve les personnages de Blain, aussi décalés qu’archétypiques. En gros, c’est l’histoire d’une motarde qui rencontre un cow-boy modèle réduit.
Contrairement à ce qu’annonce le sticker sur la couverture, à savoir une BD musicale, il s’agit plutôt d’une nouvelle, retranscrite dans le livre et lue dans le CD, illustrée par les chansons de Barbara Carlotti, dont les paroles figurent également dans le livre, ainsi que par les planches de BD de Christophe Blain. Cette multiplicité des supports, si elle provoque chez le lecteur-auditeur toute une gamme de sensations et l’immerge dans les méandres d’un récit dense et original, s’avère néanmoins plutôt déroutante. Pour ma part, j’avais choisi la totale : lire la nouvelle en l’écoutant simultanément. Un exercice qui s’avère assez fastidieux au bout d’un temps car il ralentit la lecture. Le fait que certaines planches de BD soient décalées par rapport au texte lu est aussi gênant car, même si l’on n’est jamais paumé, cela nuit à la fluidité du récit.
J’aurais peut-être dû soit zapper la lecture des textes et écouter le CD en regardant les illustrations BD et à la limite en lisant les paroles des chansons ou alors juste lire le livre et n’écouter dans le CD que les chansons… sauf que la chanson française, en ce qui me concerne… je suis définitivement « Luzien ». Et si je reconnais les qualités intrinsèques de Barbara Carlotti, ses musiques, sa voix sonnent beaucoup trop hexagonales pour moi, trop littéraire et trop linéaire, privilégiant le texte au détriment de la mélodie et de la musique, bref du bien de chez nous.
Cet exercice de style aurait pu, à mon humble avis, être génial en se limitant à deux médiums au lieu de ce triptyque qui s’égare en empruntant trop de chemins, BD, nouvelle et livre audio. Pourquoi pas juste un récit audio illustré en musique et en BD avec le double, voire le triple de planches ? Là oui, on aurait pu parler de BD musicale, la musique des chansons et celle de la voix lisant le texte.
Au bout du compte, La Fille me laisse perplexe, peut-être parce que je n’ai pas su comment la prendre (oui, bon, désolé). Le multimédia, c’est génial, à condition d’avoir assez de mémoire vive… je dois pas être équipé de la bonne version. N’empêche que l’expérience méritait d’être faite et que je ne regrette pas le voyage, même sur le siège passager d’une moto anglaise tape-cul.