One, two, three, four, Ramones!

Dessins : Eric CARTIER – Textes : Xavier BÉTAUCOURT et Bruno CADÈNE

A la soûlante et sempiternelle question « Qu’est-ce que le Rock’n Roll ? », les plus flemmards des spécialistes de la question, journalistes, zicos ou amateurs plus ou moins éclairés auront tendance à répondre en citant un groupe ou un artiste. Elvis arrivera le plus souvent en tête de liste et on essaiera d’avoir une pensée charitable pour ceux qui diront « Johnny » mais alors ce sera sans moi, le culte du grand Binaire Primaire imposant une intransigeance sans faille pour les âmes perdues qui brûleront pour l’éternité au Paradis (fiscal, évidemment).
En étudiant de plus près la question, je conviendrais assez facilement qu’il est un groupe dont le parcours, la musique, le look et bien sûr la légende remplit tous les critères pour incarner dignement l’essence du Rock’n Roll. Le vrai, celui de la classe dominé, des laissés-pour-compte, des losers et par dessus tout de la déglingue. Ramones 1 Et, en se référant à l’avis très autorisé d’un maître du genre, à savoir Frank Black, qui conseillait leur écoute pour expliquer à un Martien ce qu’est le Rock’n Roll, citer les Ramones est assez imparable. Groupe culte, que tout le monde connaît sans l’avoir jamais vraiment écouté, à par les mélomanes bien sûr, les Ramones avaient tout pour devenir le plus grand groupe de l’histoire du Rock et ils le sont devenus d’une certaine façon. Trait d’union entre le Rockabilly des origines au Revival Punk de la fin des Seventies, dont ils sont considérés comme les précurseurs (avec les New York Dolls et les Stooges), leurs disques continuent à se vendre à petites doses et les tee-shirts floqués de leur logo figurent en bonne place dans la top-list des ventes, portés par des d’jeunes qui parfois ne savent même pas qu’il s’agit d’un groupe de Rock (si, si, j’en connais !).
Il existait déjà un bon paquet de bouquins sur les Ramones avec notamment les autobiographies de Johnny et Marky. Mais il manquait une version plus imagée qui restitue toute la dimension visuelle du combo new-yorkais. One, two, three, four, Ramones! constitue ainsi un biopic en bandes dessinées qui fait le tour de la question, en adoptant un vrai point de vue, mettant en perspective ce qui a fait le sel mais aussi le poison de la carrière des Ramones. En l’occurrence celui de Dee Dee, le bassiste. Celui qui a trouvé le nom du groupe et en a composé la majorité des titres. Celui qui aurait pu en être le leader, s’il n’y avait pas eu cette saloperie de dope. Le livre débute par la description de l’enfance de Dee Dee, sur une base miliaire américaine en Allemagne, entre un père violent et une mère alcoolique, avec la découverte des premières défonces. Un terreau propice à faire germer des morceaux de pur Rock’n Roll, sans détours ni faux-semblants. Dee Dee était l’âme damnée des Ramones, Johnny, le guitariste en était la tête pensante. Inventeur de leur look et de leur jeu de scène, il est ici dépeint comme le despote éclairé du groupe. Un bon gros connard d’Amerloque tel qu’on adore les détester, opiniâtre et sans scrupules, antipathique, pro-Bush, vRamones 2aguement raciste, mais implacablement professionnel, sans qui les Ramones seraient restés un petit groupe de quartier. L’opposition de style et de caractères entre Johnny et Dee Dee est l’un des arguments essentiels de cette biographie qui se dévore avec autant de jubilation que l’écoute du premier album des Ramones ou le It’s Alive de 1978.
Cette approche met un peu de côté Joey Ramone, au regard de son statut de chanteur qui aurait dû lui conférer un rôle de leader qu’il n’a jamais été capable d’assumer face à l’omniprésence de Johnny, mais justement elle souligne en creux la fragilité du personnage qui n’avait vraiment rien pour devenir une rock star… la magie du Rock’n Roll.
Point d’orgue de l’opus, une post-face très didactique commentant certaines planches afin d’expliquer le contexte de l’événement ou de l’anecdote, d’aller dans le détail et en savoir un peu plus sur le backstage de la saga Ramones, tout en révélant au passage quelques libertés délibérément prises par les auteurs avec la vérité historique, pour garder la cohérence du récit. C’est pas parce que ça jouait sur trois accords qu’on n’a pas le droit à un peu de rigueur historique.
Et puisque l’on parle de cohérence, il faut saluer le choix d’Eric Cartier pour le dessin. Son style pêchu, dépouillé et diablement efficace colle à merveille avec le Rock sans fioritures des Ramones, le recours au noir et blanc apportant cette touche vintage et nostalgique qui, ajoutée à ce juste équilibre entre vérité historique et parti-pris narratif, fait de ce biopic illustré un ouvrage indispensable pour qui veut connaître l’essentiel du plus grand groupe de Rock’n Roll de l’histoire, en y passant juste le temps d’un de ses concerts. Alors les Kids : Hey, Ho, Let’s go or what ?

Bonus Track : 3 questions (+ 1) à Eric CARTIER

Alive

Dessins et textes : LUZ

On les a tous connus ces concerts où on aurait bien voulu profiter du spectacle, suffisamment près de la scène pour ne rien rater de ces moments dérisoires d’anthologie qui font le sel du rock’n roll show, du genre quand le gratteux jette un regard dépité vers la console de retours, la petite moue complice du chanteur, le pins sur la casquette du bassiste… On est pas arrivés assez tôt pour être au premier rang ou bien on n’avait pas envie de passer deux heures, compreAlive 1ssés comme un joint de bocal à cornichons, contre les barrières.  Mais là, c’était nickel, la place idéale, légèrement excentrée, à portée de vue. Et puis le concert a démarré, on a bougé de vingt mètres en dix secondes, les premiers slammeurs vous sont tombés sur la tronche (que des barbus ventripotents évidemment, les petites meufs vous passent loin des paluches) et vous vous êtes pris les vagues de pogo (ou de mosh selon le degré de distorsion) à intervalles réguliers. Moyennant une côte fêlée, un orteil écrasé et un hématome au sommet du crâne, vous aurez vécu l’histoire du Rock avec un grand H. Mais bon, il faut la mériter sa place au Paradis. Et plus tard vous pourrez dire d’un ton détaché, à l’heure du thé devant un auditoire admiratif et vaguement jaloux : Le concert de Hope In Hell (du Rock tranchant!) à Trifouillis Sur Seine, ouais, j’y étais… devant !

Ces moments de solitude de masse, Luz les a vécus aussi, dans des centaines de concert, souvent aux premières loges, dans la fosse. A un petit détail près, il tenait (ou plutôt agrippait) dans ses mimines un carnet et un crayon et il crobardait les artistes. Parfois de loin, parfois à la lisière du pogo mais parfois aussi DANS le pogo. Imaginez le mec en plein concert de Motörhead. De la folie pure. « We are Luz and we drawing Rock’n Roll ». Tous ces instantanés de concert, pris sur le vif, outre le témoignage brut de fonderie qu’ils donnaient du spectacle, constituaient un parfait indicateur de sa qualité. Si les dessins étaient trop clean, c’est que le concert était nul. Luz parvient à restituer l’énergie et l’ambiance d’un concert avec juste quelques traits, allant à l’essentiel, immortalisant les Rockers, dépouillés de tout artifice, un peu à la manière d’un Reiser car s’y ajoute un humour corrosif, pimenté d’une bonne couche d’auto-dérision.

La couverture de ce plantureux recueil des dessins de concert de Luz illustre à elle seule cette démarche sans concessions, comme leur auteur. Alive est donc une anthologie comprenant les dessins réalisés entre 1999 et 2015 et parus dans diverses publications, dont Charlie Hebdo, Fluide Glacial ou Rock & Folk ainsi que l’album Alive 2Claudiquant sur le Dance Floor. Un manifeste à la gloire du Rock où cependant la caricature sans pitié le dispute sans cesse à l’hommage pasionné. Outre les dessins de concert, le pavé, lourd comme un riff de Stoner Metal, intègre toutes les productions que Luz a faites autour du Rock (mais n’y cherchez pas The Joke) ainsi que des illustrations originales créées spécialement pour le livre, dont quelques planches récentes mettant en scène l’auteur et sa fille, encore bébé, à qui le papa s’efforce de transmettre le flambeau. Car c’est bien de cela qu’il s’agit. Entretenir la flamme d’un style musical qui a dépassé l’âge de la retraite et dont les icônes sont soit mortes, soit bien fripées. Difficile d’entretenir un idéal de liberté, de rébellion et de provocation, même chez les jeunes quand tout semble avoir été dit. L’interview croisée de Luz et Philippe Manoeuvre qui sert de préface au bouquin ne laisse guère optimiste sur l’avenir du Rock mais en attendant, il nous reste une flopée de putains de bons disques, de chauds concerts en perspective et donc désormais les dessins d’Alive pour nous remémorer ce que le Rock aura toujours de jouissif. Rien que pour ça, merci Luz, et tiens bon !

The Long and Winding Road

Dessins : Rúben PELLEJERO – Textes : CHRISTOPHER

Pour concevoir un récit dont le Rock constitue la toile de fond, on peut aller se servir dans la réserve des gimmicks préfabriqués. Genre un beau gosse ténébreux et tourmenté, une enfance malheureuse, une blessure secrète, quelques addictions, des filles sexy et peu farouches, un entourage hostile, ou encore des rebelles de carnaval bardés de cuir et de tatouages. Ça peut donner quelque chose de sympa, voire franchement réjouissant mais ça peut s’avérer aussi insipide qu’un cheeseburger de fast-food. Mais on peut aussi se fabriquer ses propres ingrédients faits maison et y apporter sa touche et sa sensibilité personnelle. Et quand, en plus, on situe l’intrigue en France et qu’on y place une bande de rockers sex-agénaires (et toujours verts) et un jeune architecte d’intérieur quadra bedonnant, on a suffisamment de matos pour créer une histoire originale. long-road-1Christopher nous avait déjà fait le coup avec son magistral Love Song où il explorait les affres de l’adultère sur fond de Brit-Pop anglaise des Sixties avec le big four du genre, Beatles, Stones, Who et Kinks. Cette fois la bande originale de ce road-movie à la française élargit les horizons, en convoquant quelques-uns des standards du Rock et de la Pop des années 1960 et 1970 dont le titre est repris pour chaque chapitre.
Ulysse doit exécuter les dernières volontés d’un père dont il ne connaît presque rien, en allant répandre ses cendres à l’endroit qu’il lui a désigné. Au volant du Commodore, le vieux Combi VW de l’éphémère groupe de son géniteur, les Tridents, une brochette de vieux anars qui n’ont pas perdu la flamme, Ulysse va entreprendre un long voyage, de Montpellier à l’île de Wight, lieu d’un festival de Rock culte du début des Seventies où s’est rendu le père d’Ulysse avec ses acolytes… et sa dulcinée. Le fils va refaire ainsi le parcours accompli quelques décennies plus tôt par le père. Grâce au journal de ce dernier et aux souvenirs encore vivaces de ses potes, il va découvrir qui était vraiment ses parents et en apprendre tout autant sur lui-même. L’odyssée sera éminemment sex, drug and rock’n roll, comme une renaissance pour Ulysse, car « De si loin que l’on revienne, ce n’est jamais que de soi-même » comme dirait l’autre (allez sur Internet, et lisez le bouquin d’où c’est tiré. Je ramasse les fiches de lecture dans deux semaines).long-road-2
On concédera que le pitch n’est pas ultra novateur. Mais la réussite de ce nouveau pavé (plus de 180 pages en grand format!) dans la mare déjà bien remplie des histoires de road-trips est d’avoir pris le temps de développer les personnages et les situations et de ciseler un récit nostalgique d’une époque mythique du Rock, d’autant plus fantasmée qu’elle symbolise plus que les autres ce rêve perdu d’une ère nouvelle, sans tabous ni interdits où la musique et l’amour auraient pu prendre le pouvoir. Ulysse et ses oncles par procuration illustrent cette quête sans espoir mais vitale d’une jeunesse enfuie vers laquelle nous devrions tous courir à perdre haleine, jusqu’à notre dernier souffle.
Il faut enfin saluer le travail remarquable de Rúben Pellejero dont la ligne claire, précise et épurée offre au scénario riche et dense de Christopher la fluidité nécessaire pour avaler d’une seule traite ce long périple sur cette route longue et sinueuse qu’on rêve tous de prendre, où qu’elle nous mène.

Welcome to Hell(fest) – Le Retour

Dessins : Johann GUYOT – Textes : Sofie VON KELEN

Vous aviez cru être peinards mais vous vous êtes mis le Pentacle bien profond. Car, oui, les Poilus de l’Enfer sont bien de retour. Pour les incultes, (je ne les qualifierai pas d’infidèles, par les temps qui courent, ça pourrait faire désordre), et comme l’automne est de retour avec son lot de spleen, de langueur… et surtout de grosse flemme, je me bornerai à renvoyer à la chronique et la petite interview présentes sur le site, relatives au premier tome paru en 2015.
welcome-to-hellfest-le-retourPar rapport à ce dernier, pas de changements radicaux et donc que du hautement recommandable, entre mini-chroniques, instantanés de concert, tronches de Métalleux expressives et encarts didactiques pour les moins pointus des lecteurs (ça permet de se la péter devant les potes entre deux chips et une gorgée, à l’heure de l’apé-rot). Le tout saupoudré de cette petite pointe d’humour et d’autodérision qui rappellent opportunément que tout ça, c’est avant tout du Rock’nRoll.
A noter que ce nouveau bréviaire est cette fois consacré exclusivement à l’édition 2015 du Hellfest. Alors, enfilez vos cornes, remplissez votre chope, mettez vos protections auditives (oui, bon d’accord, pour les moins jeunes). A lire en headbanguant en rythme, index et auriculaire dressés fièrement. Les plus souples peuvent faire le poirier.

White Trash

Dessins : Martin EMOND – Textes : Gordon RENNIE

White Trash 1

Dans le supermarché des fantasmes Rock, le Road-Trip figure en tête de gondole. Dans une décapotable, profilée comme un missile, longue comme le pire cauchemar de l’apprenti conducteur négociant son premier créneau. En plein désert, sur une route à deux 6, le troisième restant en filigrane, bien planqué, pour ne pas effrayer les bonnes âmes en attirant la Bête. La musique à fond, forcément binaire et saturée, vous roulez pénard sous un soleil de plomb, une paire de Ray-Bans sur le museau, en loup solitaire ou bien accompagné et dans tous les cas, vous êtes le roi du Bitume (ou l’Aigle de la Route, à condition que Mad Max soit en train de prendre sa pause).
Évidemment, c’est beaucoup plus fun quand votre but est de rejoindre Las Vegas en un seul morceau, alors que vous avez une armada à vos trousses composée du FBI, du Klux Klux Klan, de prédicateurs fanatiques et d’une paire de péquenots dégénérés échappés d’un film Gore de série Z. Le but commun de cette joyeuse équipe armée jusqu’aux dents étant bien sûr de vous faire la peau. Si en plus, vous braquez quelques banques pour financer les faux frais, c’est encore mieux.
A tous ces niveaux, White Trash respecte scrupuleusement l’intégralité du cahier des charges d’un récit dont le pitch n’a rien de vraiment orignal. Mais en l’occurrence, ce n’est pas la qualité de la gnôle qui compte mais bien celle du flacon, et là, il est indéniable qu’il s’agit d’une des BD les plus déjantées de l’histoire du 9è Art, tous genres confondus. On ne peut s’empêcher de penser à un remake des Blues Brothers en version trash, customisée et gonflée aux mauvais sentiments. Car les deux héros, Dean le « Dude » et « Le King » sont des clo(w)nes maléfiques d’Axl Rose et d’Elvis Presley, une connexion chaque jour plus évidente et prémonitoire quand on voit l’évolution du dernier chanteur d’AC/DC, bientôt aussi bouffi que son glorieux aîné.
Mais ici, les deux compères s’entendent comme larrons en foire, défouraillent et exterminent sans distinction, dans le sillage de leur odyssée sanglante aussi bien le salopard que la veuve et l’orphelin. Difficile d’avoir de l’empathie pour ces « Cadillac Killers » saWhite Trash 2ns merci, si ce n’est qu’à travers eux, le mythe de la Grande Amérique s’en prend plein la tronche, racistes, pro-gun et culs-bénis en première ligne. Et c’est l’essentiel à retenir de ce périple mortifère et transgressif qui laissera sur leur faim les lecteurs habitués aux intrigues bien construites et au suspense millimétré.
… Sauf le dessin qui vous colle une claque comme vous n’êtes pas prêts d’en reprendre une de sitôt, d’autant que le dessinateur s’est suicidé en 2004, ce qui n’en surprendra pas beaucoup. Peu soucieux de lisibilité et de fluidité narrative, Emond enchaîne des mini fresques Rock’n Roll, touffues, explosives et hautes en couleurs (un peu trop parfois au détriment de son dessin), tantôt magistrales, tantôt absconses, truffées de détails et d’un humour souvent noir. Ses personnages forment un bestiaire grand-guignolesque qui pourrait par moment évoquer du Jérôme Bosch sous acide. On est à la lisière de la virtuosité et de la confusion, dans un univers personnel souvent déroutant. White Trash est comme ces solos de guitare ultra techniques qui peuvent impressionner tout autant qu’exaspérer le public mais ne laissent pas indifférents. Une sorte d’ovni (Objet Dessiné Non Identifié) que tout amateur de BD Rock se doit d’avoir lu.

Le Heavy Metal

Dessins : Hervé BOURHIS – Textes : Jacques DE PIERPONT

Chez le béotien, tout morceau de Rock qui bastonne un tant soit peu est souvent désigné par le vocable passe-partout de Hard Rock. Face à ces mécréants, toute tentative d’édification semble vouée à l’échec. Leur expliquer ce qui différencie AC/DC de Nirvana s’avère à peine moins fastidieux que l’écoute du dernier album hommage à Jean-Jacques Goldman (un vrai hard-rocker, pour sûr, tellement il a saigné sur les Gibson…). Perso, j’ai essayé pendant deux minutes de démontrer à un fan de Coldplay (non, je jure, je le connais à peine) en quoi Iron Maiden était bien plus mélodique que la NWOFS (New Wave Of French Song pour les bilingues). J’ai commencé à utiliser des mots comme Death, Black, Trash… et bien sûr Heavy Metal. Mais face à l’encéphalogramme plat de mon interlocuteur qui ne soupçonnait même pas l’existence de tous ces groupes de chevelus vociférateurs, j’ai cessé le Le Heavy Metal ; Bourhis © Le Lombard, 2016combat. 
Mais ça c’était avant. Car désormais, il me suffira de brandir Le Heavy Metal, vade-mecum qui décrypte cette musique si… différente, depuis ses origines jusqu’à nos jours où le style s’est ramifié en une profusion de chapelles et de sous-genres dans lesquels les amateurs du genre se distinguent de la plèbe asservie au Rock préformaté. Jacques de Pierpont, spécialiste érudit du Métal, s’est allié à l’un des dessinateurs les mieux à même de dépeindre le foisonnement de cette culture riche en poils et en décibels : Hervé Bourhis reprend ici la recette graphique qu’il a mise au point et déclinée dans Le Petit Livre Rock et le Petit Livre Beatles : Un patchwork de dessins sobres et efficaces qui illustrent et garnissent ce cabinet de curiosités métalliques. Un procédé qui permet de se balader au gré des pages, sans lasser le lecteur, malgré la foule d’informations délivrée. Grâce à ce brûlot qui peut subrepticement se glisser partout, sac à dos, bas résilles ou poche de treillis, vous saurez tout… Le signe du Dio-ble (celle-ci mérite que je brûle en enfer pendant plusieurs éternités), l’histoire, les groupes, les albums, les fringues, les anecdotes, les festivals… qui composent le Culte du Métal, de Black Sabbbath au Hellfest, comme l’annonce le sous-titre.
Heavy Metal 2Cela étant dit, il faut bien replacer l’ouvrage dans le contexte de cette nouvelle collection du Lombard, la petite bédéthèque des savoirs, qui vulgarise par le medium de la BD des thématiques très diverses. Donc, les fins connaisseurs de gros Rock qui tâche n’apprendront sans doute pas grand-chose et auront beau jeu de relever certaines omissions sans doute volontaires mais, le sujet étant aussi vaste que pointu, on aurait mauvaise grâce de s’en plaindre. Pour ma part, je pointerais quand même le peu de place accordé à Faith No More, ce qui pour le coup relève du blasphème ultime.

Mais sinon, comment ne pas saluer ce petit opus qui gagne haut la main, auriculaire et index fièrement dressés vers le ciel, le pari de faire le tour de la question et de montrer toute la richesse et l’originalité de ce genre musical qui constitue une véritable culture, avec ses codes, ses rites, ses traits, qu’ils soient de noblesse ou franchement caricaturaux. De quoi réviser ses classiques, briller dans les conversations de salon entre deux pintes et une poignée de chips et bien sûr convertir de nouveaux adeptes, au grand dam de Sainte Christine.

Lennon

Dessins : Horne – Textes : Eric Corbeyran

Jésus-Christ est mort le 8 décembre 1980. Depuis, les exégètes se sont bousculés au portillon pour donner leur version du nouveau testament. Comment un prolo de Liverppol a fondé le groupe le plus mythique de toute l’histoire de la musique et pas que populaire. Sur Lennon tout a donc été écrit et les zones d’ombre sont si réduites qu’à part les pensées intimes de l’intéressé, on ne voit pas trop ce qu’il y aurait à rajouter.
Les pensées intimes, c’est justement le parti adopté pour ce biopic, adaptation du livre de Foenkinos, qui renouvelle un peu le propos en faisant parler Lennon dans une longue confes Lennon ; Horne © Marabulles, 2015sion auprès d’une psychanalyste imaginaire dont on ne verra que les jambes impeccablement galbées.
A New-York, dans l’immeuble Dakota où il vit avec sa petite famille et où il a acquis une forme de sérénité, Lennon vient régulièrement s’allonger sur le divan. Il retrace ainsi toute sa vie depuis l’enfance troublée par des parents défaillants jusqu’à cette funeste soirée où Mark Chapman a mis un terme à la légende à coups de revolver. Il parle sans pudeur et sans artifice, avec le détachement de quelqu’un qui n’a plus rien à prouver et donc plus grand-chose à cacher, qu’il s’agisse des blessures intimes, des épisodes peu glorieux ou des moments de grâce.
Sur la forme donc, cette incarnation subjective est astucieuse, car elle donne une réelle densité et un vrai parfum de sincérité à cette énième version de l’histoire de Lennon.
Sur le fond, si vous avez déjà tout lu sur les Beatles et sur Lennon ou même si vous estimez en savoir assez, ne cherchez pas la petite bête, l’anecdote ultime ou la révélation fracassante, vous serez déçu. En revanche, pour les béotiens et même pour les érudits, à titre cette fois d’aide-mémoire, vous saurez tout ce qu’il faut savoir sur la saga des Beatles et du rôle prépondérant qu’y a joué Lennon. Le tout servi par un élégant lavis noir et blanc qui rend un bel hommage à tous les protagonistes, fidèlement reproduits, ce qui est digne d’éloges tant il est facile de tomber dans la caricature quand il s’agit de montrer ces icônes tant de fois mises en peinture, avec plus ou moins de justesse. Là, le contrat est parfaitement rempli.
 Lennon ; Horne © Marabulles, 2015Les tenants et les aboutissants de la saga sont impeccablement décortiqués et mis en perspective avec notamment une présentation tout à fait objective de l’irruption de Yoko Ono et de son rôle de révélateur plus que de déclencheur de la crise qui couvait au sein des Fab Four. De même la rivalité extraordinairement productive entre Lennon et Mac Cartney est abordée avec lucidité. Les fans de Lennon regretteront peut-être que l’on passe assez vite sur la partie post-Beatles qui, il faut l’avouer, fut nettement moins enthousiasmante, hormis deux ou trois tubes dont un hymne pacifiste bisounours, un hommage Rock’n Roll peu inspiré et quelques élucubrations bruitistes avec la miss Yoko. Je sais que je me suis pas fait des copains sur ce coup là mais j’assume.
Pour les mécréants, réfractaires au culte de Mister John et aussi pour les petits jeunes qui ne maîtrisent pas l’histoire sainte, on ne pourra donc qu’inciter à la lecture de cet opus, propice à leur ouvrir les esgourdes et même les méninges, en ce qu’elle offre une (auto)analyse édifiante sur la condition de Rockstar.

Le roman de Boddah – Comment j’ai tué Kurt Cobain

Dessins et textes : Nicolas OTÉRO

Le Rock s’en était pris plein la tronche pendant les années 1980. Les vieilles gloires des Sixties bégayaient leurs gammes, le Punk n’en finissait plus de crever, les permanentes régnaient sur le Métal et AC/DC commençait à nous casser les burnes. Comme dans les plus grosses périodes de crise, on était contraint de s’orienter vers les valeurs sûres, genre Springsteen, Cure ou Maiden, histoire de ratisser large. On gérait frileusement son portefeuille, en attendant le gros coup, le truc qui allait tout (re) ou (ré)péter, mais ça semblait vraiment compromis. En France, les Variéteux prenaient toute la place et polluaient les ondes avec leur bouillasse synthétisée régnant sur le Top 50. Il y avait certes le paradoxe du Rock alternatif (à quoi, d’ailleurs ?) mais malgré une bonne volonté et une énergie évidentes, ça manquait encore de consistance. Roman de Boddah 1
Et puis, soudain, la bombe a explosé et a fait table rase de tout le reste. Tout y était, la pochette provocatrice, la photo de ces trois mecs avec leur trogne de rebelles, le doigt d’honneur… Et puis les titres, des hymnes Rock mâtinés de Punk, de Hard et de Pop, gorgés de saturation, sur une ligne rythmique de plomb, qui exprimaient cette urgence et cette révolte qu’on attendait tant. C’était le début des années 1990 et on savait déjà qu’avec Nevermind, on en prenait pour un bail. Kurt Cobain, qui était à l’origine de ce cataclysme, lui en a pris pour l’éternité à peine trois ans plus tard en se faisant sauter le caisson, entrant ainsi dans la légende, Club des 27 et tout le bazar.
Vingt ans plus tard, des tonnes de papier ont été noircies pour tenter de cerner le phénomène Nirvana et plus particulièrement l’énigme Cobain, l’enfant chéri du Rock, jeune, beau, célèbre et bourré d’un talent dont on a fini par comprendre qu’un insondable mal de vivre en constituait le principal ingrédient. Alors quoi, encore un biopic de plus ? Sauf que Nicolas Otéro, en adaptant le livre d’Héloïse Guay De Bellissen, a décidé d’attaquer la légende par un angle original qui constitue sinon la clé, du moins l’un des révélateurs de la tragédie Cobainienne (je la tente, vous la gardez ou pas). Celui d’un personnage imaginaire que Cobain a inventé quand ses parents ont divorcé. Il s’appelait Boddah et c’est à lui que Cobain a écrit, juste avant son suicide, une lettre intégralement et opportunément reproduite à la fin du livre.
Confident, meilleur ami, alter-ego… Boddah était tout cela. En lui donnant un visage et une voix, Le roman de Boddah nous fait découvrir l’intimité de Cobain, ses pensées secrètes, ses angoisses, ses démons et surtout sa détresse qui n’ont fait que grandir jusqu’à l’issue fatale. Éludant l’enfance de Cobain, le récit débute aux dernières années, juste pendant la période Nevermind et la rencontre avec Courtney Love. Sur ce point précis, il faut saluer une approche qui évite la condamnation simpliste de l’ambitieuse leader de The Hole dont la personnalité ne pouvait s’accommoder d’un mec aussi perturbé. Elle s’imaginait former avec lui avec le couple de Rockstars le plus cool du moment, mais elle a été incapable de gérer les addictions et la déprime chronique de Cobain qui a bien failli l’entraîner dans sa chute. Quelle qu’ait été son attitude minable après la mort de Cobain, ils ont vécu une passion, destructrice, mais une passion quand même qui constitue l’axe du récit.
Mais surtout, il y a Boddah, dont le livre propose une incarnation tout à fait convaincante. Boddah est le contre-champ de CobRoman de Boddah 2ain qu’il ne juge ni ne conseille. Il est juste une présence qui accompagne le chanteur de Nirvana, fidèle comme une ombre, sans intervenir et devient le témoin imperturbable de sa déchéance. Otéro s’est plongé comme un mort de faim dans son sujet et n’ a mis que huit mois à réaliser tout seul ces 150 pages en couleurs directes et lettrage à la main. Cette sincérité et cette implication totale se retrouvent dans son dessin et son découpage, vifs et énergiques, comme la musique de Nirvana dont la puissance est parfaitement restituée dans de superbes scènes de concert. L’auteur compose un Cobain parfaitement crédible aussi bien dans ses moments de folie que dans les passages plus intimes avec Boddah ou Courtney Love. Ce roman graphique contribue ainsi à lever un peu plus le voile sur la personnalité complexe et torturée de Cobain. Ce dernier a (re)donné envie à tellement de gens d’écouter du gros Rock que ça valait assurément un biopic de plus, surtout de cet acabit.

Bonus Track : 3 questions à Nicolas OTÉRO

Welcome to Hell(fest)

Dessins : Johann GUYOT – Textes : Sofie VON KELEN

Tous les mois de juin, dans la paisible campagne ligérienne, au milieu des vignes, une de ces bourgades traditionnelles qui font le charme de nos belles et douces provinces françaises, se transforme l’espace de quelques jours en antichambre… de l’Enfer.
Des cohortes de mâles, plus ou moins vigoureux et de femelles plus ou moins vêtues, mais tous, ou presque, dotés d’un système pileux ou capillaire fort développés, déferlent dans la petite ville de Clisson, envahissant ses rues et ses commerces et surtout ses bars, ainsi que le rayon bière et biscuits de son supermarché Leclerc. Ces hordes vociférantes arborent fièrement des tee-shirts à la gloire de groupes inconnus du public de Michel Drucker ou de Naguy, des vestes de jean ornées de patchs, comme autant de médailles récoltées dans la furie des concerts ou recyclent les fondamentaux de l’imagerie Rock, jeans, cuirs et clous entre autres, avec un zest de médiéval etWelcome to Hellfest 1 une once de religion, pour créer les looks les plus improbables, composant ainsi un joyeux carnaval rock’n roll.
Pendant trois jours plus de 150 groupes puissamment électrifiés font hurler leur cordes vocales et leurs guitares sur fond de beats de batterie telluriques. 150 000 pèlerins viennent admirer ces idoles assurément païennes et sacrifier ainsi au culte du Dieu Métal et à celui de son cousin tout aussi agressif, le Punk, les ancêtres de la fratrie, Hard Rock en tête, n’étant pas en reste dans ce séisme musical et bruitiste. Le Hellfest, à l’origine un événement underground réservé à un public averti est devenu aujourd’hui une véritable institution, deuxième festival de musiques actuelles en France en fréquentation, le premier si l’on parle de Rock exclusivement. Comme dirait ce bon vieux Clint, le monde se divise en deux catégories, ceux qui vont au Hellfest et ceux qui creusent.
Johann Guyot fait partie de la première catégorie et, comme l’ami Will Argunas avec son Pure Fucking People, œuvre de surcroît pour faire connaître aux masses incultes et partager en images ce festival haut en couleurs et en décibels. Welcome to Hell(fest), qui retrace trois éditions du Hellfest, de 2012 à 2014, est une sorte de carnet de voyage en pays métalleux, un patchwork d’instantanés de concerts, avec un dessin noir et blanc sans fioritures, rudement efficace pour restituer l’énergie et l’imagerie du Métal. L’auteur a crobardé avec jubilation une belle galerie très expressive de portraits de ces chantres du gros son, pris sur le vif, guitare en érection et tignasse au vent. Le tout souvent agrémenté d’une courte présentation juste ce qu’il faut de didactique ou de commentaires personnels sur les artistes immortalisés. Il a également retranscrit quelques éléments incontournables du Hellfest, qu’il s’agisse des lieux ou des à côtés des concerts. Avec pas mal d’humour et d’auto-dérision, Guyot n’hésite pas se mettre en Welcome to Hellfest 2scène pour livrer quelques unes de ses expériences de festivalier, coups de cœur ou plans foireux qui font le charme de ces purs moments de Rock’n Roll. L’opus est complété par quelques mini-chroniques ainsi que de courtes interviews de zicos, réalisées par Sofie Von Kelen, qui apportent une dimension journalistique au bouquin. On regrette même qu’il n’y en ait pas un peu plus.
Ceux qui participent tous les ans à cette grande messe électrique, retrouveront dans ce bréviaire le parfum et l’écho de leurs souvenirs de fidèle pratiquant de la liturgie du Métal. Ceux qui ne connaissent pas le Hellfest comprendront peut-être un peu mieux de quoi il retourne et sans doute que cela donnera envie à certains de mettre le cap à l’Ouest. Quant aux autres, tant pis pour eux… qu’ils continuent de creuser, Motherf…rs !

Bonus Track : 3 questions à Johann Guyot

California Dreamin’

Dessins et textes : Pénélope BAGIEU

Comme beaucoup, je trouve que « beauté de l’intérieur » est l’une des ces expressions au mieux passe-partout, à la limite hypocrite et au pire parfaitement cynique pour désigner ceux avec qui la nature ou la vie n’ont pas été très généreuses, voire franchement salopes. Le genre de formule tellement galvaudée qu’elle en devient souvent assassine dans la bouche de gens mal ou bien intentionnés, seconde hypothèse sûrement la plus destructrice, l’Enfer étant toujours pavé de bonnes intentions.
Oui mais voilà, il y a aussi ceux pour qui cet aphorisme creux sonne pourtant comme une évidence. « Mama » Cass Eliott, Ellen Naomi Cohen dans le civil, appartient à cette noble caste. Les Mamas and Papas est un groupe dont le nom n’évoque peut-être rien à la majorité des moins de trente ans mais dont les chansons les plus connuCalifornia Dreamin' 1es restent souvent gravées dans la tête de la plupart de ceux qui les ont entendues au moins une fois, toutes générations confondues. California Dreamin’ est leur plus gros succès et ses paroles résument parfaitement le destin de cette fille qui prenait toute la place sur les photos du groupe. Pas à cause de sa carrure impressionnante qui fait ressembler les autres membres à un trio d’anorexiques mais à cause de son regard et d’un charisme qui s’imposent au spectateur. A côté d’elle, Michelle Phillips, l’autre fille, blondinette gracile et épouse de John, le song-writer du quatuor, belle de l’extérieur sans être forcément laide à l’intérieur, paraissait sans relief. Et quand Mama Cass se mettait à chanter, le doute n’était plus permis : La star des Mamas and Papas, c’était elle.
Pénélope Bagieu retrace ce rêve californien dans ce qu’il a de plus intemporel et de plus impitoyable. De la petite fille d’émigrés juifs, enjouée et sûre d’elle jusqu’à la grande chanteuse qu’elle avait toujours su qu’elle deviendrait, en détaillant avec minutie depuis l’enfance, toutes les étapes d’une destinée hors normes où malgré tous les contraires apparents, les astres finissent (presque) par s’aligner.
Servie par un crayonné sobre et élégant, la narration prend le temps de mettre en lumière la psychologie de l’héroïne, passionnée, romantique sans être niaiseuse, animée d’un énorme appétit, pour la vie en général, qui la rendait irrésistible et en a fait une icône de la Pop des années 1960. Le récit met également en évidence le don musical de Mama Cass, qui au delà d’une voix unique avait une créativité et un sens de la modernité qui a contribué à faire des Mamas and Papas bien plus qu’un de ces groupes de Folk gentillets en vogue à l’époque. Enfin, California Dreamin’, c’est aussi, et peut-être surtout la relation de Mama Cass avec Denny Doherty, la deuxième belle voix du groupe, histoire d’amour impossible ou contrarié, qui a nourri la chanteuse bien plus que les sandwichs King Size.California Dreamin' 2
La manière dont Pénélope Bagieu a réussi à donner vie à sa Mama Cass est bluffante. Au delà de la ressemblance purement physique, elle fait ressortir avec brio l’expressivité de la jeune femme, qu’il s’agisse de son regard ou de ses attitudes avec cette façon naturelle de camper ses formes généreuses sans sombrer dans le ridicule. L’auteure restitue avec brio la sensibilité de ce personnage émouvant auquel on s’attache dès le premier dessin. Et, cerise sur le gâteau, (je pouvais pas la louper celle-là), elle a eu le bon goût d’arrêter le récit au moment où la vie et la carrière de Mama Cass rentrent dans l’histoire, pour que reste intact un rêve qui ne doit jamais s’arrêter.

La famille Carter

Dessins : David Lasky – Textes : Frank M. Young

Il paraît que Steven Tyler, le chanteur lippu d’Aerosmith, va enregistrer un album solo… de Country. Difficile d’imaginer la Rock Star chevelue entonner des vieux standards de Hillbilly ou de Blue Grass, entouré de musiciens de sessions à la barbe foisonnante et à la chemise à carreaux tendue par un bide proéminent. Sauf qu’avec le Blues, la Country est un des aïeuls du Rock, pour faire simple, car la famille est nombreuse et la généalogie complexe. Tout comme la famille Carter dont j’avoue n’avoir jamais entendu parler avant que ne me tombe dans les mains ce salutaire opus de près de 200 pages qui narre l’histoire de cette famille populaire (dans les deux sens du terme) de l’Amérique profonde.
Famille Carter 1Mon ignorance crasse était tout juste tempérée par un prénom, June, une fille de la deuxième génération de cette famille prolifique en talents. June Carter… Johnny Cash, la connexion était faite dans ma petite cervelle. Mais c’est surtout d’Alvin Pleasant (A.P. pour les intimes), sa femme Sarah et sa cousine Maybelle dont il est question dans ce biopic qui tient en fait plus du roman graphique. Car la saga de cette famille n’a rien à envier à celle des illustres rejetons qui seront ensuite engendrés dans la longue lignée du Rock. Mais ici, il n’est pas question d’overdoses, de chambres d’hôtel défoncées ou de méga-concerts dans des stades pleins à craquer. Juste une famille d’américains très modestes dans un comté paumé de Virginie, au début du 20è siècle. Leurs conditions de vie sont précaires et dans ce contexte, la musique est un loisir qui devient carrément un luxe quand il faut d’abord songer à remplir les assiettes. Sans compter que faire de la musique n’est pas alors une activité très recommandable, certaines bonnes âmes affirmant ainsi que le violon est un instrument du Diable.
Et pourtant, c’est la musique qui permet à A.P. de rencontrer l’élue de son cœur, en l’entendant chanter une vieille rengaine, puis qui le pousse à battre la campagne pour glaner de vieux morceaux traditionnels et les retranscrire pour leur donner une seconde vie. De vieux airs contant des histoires simples des gens de la campagne qui se transmettaient jusque là de bouche à oreille, sans livret ni partition. En dépit des préoccupations alimentaires forts légitimes de son épouse, il la convainc ainsi que sa cousine d’aller à la ville graver sur sillon ces chansons qu’ils interprètent pour passer le temps. Pas de tables de mixage et d’ingénieurs du son. Les prises se font en live derrière un micro et les disques tournent en 78 tours.
La notoriété de la famille Carter va tranquillement se développer et lui ouvrir les portes d’un succès plus tard amplifié par des piges quotidiennes à la radio. Ça ne leur permettra pas de s’offrir une vie de pacha dans des villas avec piscine et gardes du corps mais juste de quoi s’assurer une existence décente, à l’abri du besoin, avec un pécule à transmettre à leurs enfants.
Famille Carter 2Cette histoire aurait pu s’avérer bien fade, avec son lot de bons sentiments mais Frank M. Young a su restituer toute l’étonnante modernité du destin de cette famille dont les origines rurales et les valeurs traditionnelles ne les ont pas empêché de garder l’esprit ouvert et d’être novateurs pour leur époque, qu’ils s’agisse de musique ou de relations amoureuses. Au fur et à mesure que les pages se tournent, l’empathie pour cette famille de musiciens au talent inversement proportionnel à la prétention ne fait que croître. Outre une narration et un récit dense, riche en évènements et anecdotes et qui prend le temps de camper personnages et décors, la fluidité et le style sans esbroufe du dessin de David Lasky collent impeccablement à l’évocation de cette époque et de cette musique intemporelle qu’on s’empressera d’aller écouter sur Internet pour voir de quoi il retourne. Avec la confirmation que dans ces rythmiques de guitare et ces mélodies de chant se trouvent certaines des racines essentielles de ce machin protéiforme qu’on appelle aujourd’hui le Rock.

La Main Heureuse

Dessins et textes : Frantz DUCHAZEAU

Il y a les Limousines Blanches longues comme un morceau de Rock progressif et puis il y a les Dodoches vertes. Il y a la Route 66 et la départementale 124. Il y a le Madison Square Garden et la MJC de Saint Villenbourg. Il y a… les plus perspicaces auront deviné, on va causer de Rock français. Non, restez, vraiment, ça vaut le coup. Car ici aussi, il y eut un véritable âge d’or, pendant la pire décennie de l’histoire du Rock, les années 1980, dix années sacrément gratinées où en plus la variétoche était en plein chant du cygne. Main Heureuse 1Non, les d’jeunes, on va pas faire dans la nostalgie béate mais sachez qu’en ce temps là, les groupes de Rock bien de chez nous germaient dans tous les patelins desservis par EDF et qu’enfin certains d’entre eux soutenaient enfin la comparaison avec les ténors anglo-saxons, du moins sur scène. J’en ai déjà causé dans la chronique consacrée à la BD sur Luwig Von 88, donc trêve de radotages. De toute cette scène « alternative », un groupe se détachait. Pas forcément le meilleur, mais il avait ce truc en plus, qui grâce au bouche à oreille, n’a cessé d’enfler et au final lui a procuré un succès et une reconnaissance dans les médias « grand public », que ses pairs n’ont jamais atteint. La Mano Negra déchirait en concert et, rien qu’avec ça, a joué un rôle important dans l’émancipation du Rock en France, surfant sur la vague d’un Rock indépendant qui a fini par engloutir tous ses protagonistes. Ses prestations live étaient si intenses que l’écoute des disques après les avoir vus en action pouvait paraître bien fade, à l’instar d’un Shaka Ponk aujourd’hui.
Frantz Duchazeau a pris l’option d’évoquer ces heures glorieuses par le meilleur angle qui soit, celui du public. Deux ados fans de Punk coincés dans leur cambrousse charentaise apprennent que leur groupe va passer à Bordeaux, pas loin de chez eux. Enfin… pas loin, à 100 bornes. C’est en se matant pour la énième fois sur une cassette VHS un concert de leurs idoles que ces deux branleurs décident d’entamer leur odyssée vers le Graal. Avec pour seul moyen de locomotion une vieille motobécane à la chaîne défaillante, à peine moins compliqué que d’aller sur la planète Mars. Mais nos héros sont jeunes, ils n’ont peur de rien et la promesse est si belle…Leur route sera semée d’embûches et de galères et débouchera sur un épilogue aussi elliptique (Aïe ?) qu’astucieux (Ouf !), une fois n’est pas coutume.
Cette histoire, nous sommes si nombreux à l’avoir vécue avec des variantes et des fortunes diverses. Duchazeau en offreMain Heureuse 2 une version road-movie tout à fait convaincante. Avec un noir et blanc dense et sobre, ses dessins nous transportent en 1989, au temps de Best et des Enfants du Rock, à travers une chronique qui évoque ce temps béni de l’adolescence, aussi magnifiquement stupide qu’enthousiaste quand l’écoute d’un disque ou le visionnage d’une vidéo suscitent la transe et la séance d’Air Guitar devant sa platine. L’identité de la Mano Negra, mix improbable et foutraque de ferveur latine, de gouaille franchouillarde, de cirque et d’esprit Rock’n Roll est parfaitement restituée. Le récit ménage également quelques petites plages d’introspection onirique où l’un des héros, apprenti dessinateur de BD (ben voyons…), se perd dans les chimères suscitées par la rencontre entre l’imagerie de la Mano Negra (pin-up gitane et gorille débonnaire) et ses angoisses et fantasmes d’adolescent encore marqué par le divorce parental.
Une épopée juvénile délicieusement intemporelle autant qu’un bel hommage à ce qui fait le sel de la passion pour le Rock… quels que soient l’époque et l’âge de l’auditeur.

The Four Roses

Dessins : Jano – Textes : Baru

Certains Rockers ont un style est unique. Un timbre de voix, un son de guitare qui les distinguent à ce point de leurs pairs que même après une longue absence, leur irruption entre nos deux esgourdes, nous procure le même plaisir que lors de nos premières écoutes adolescentes. En BD, également, la patte inimitable de certains dessinateurs se repère de loin et les démarque immédiatement au milieu des rayons de librairies débordant de nouveautés éphémères. Jano fait partie de cette noble caste. Découvrir un nouvel opus du père de Kebra fait partie des plaisirs de la vie qui vous égaient une journée et au delà. Et quand en plus, l’opus en question s’avère avoir été scénarisé par Baru, l’excitation pointe un museau aussi proéminent que la truffe des personnages animaliers qui sont la marque de fabrique de Jano.
 2The Four Roses (rien que le titre en forme de clin-d’oeil nous promet déjà un récit bien rock’n roll), recèle une intrigue qui envoie le lecteur de la Meuse aux States comme une lettre à la Poste et qui à l’instar de ses protagonistes offre le prétexte à de réjouissantes retrouvailles avec les sources de la BD Rock. Comme au bon vieux temps de Métal Hurlant et des albums souples aux couvertures flashy des Humanos. Sauf qu’ici l’objet a un peu plus de gueule, comme toute la production Futuropolis, soit dit en passant.
Dès les premières cases, (précision : celles de Jano, pas celles de l’avant-propos de Baru qui nous balance du Michel Sardou en faisant au passage une salutaire mise au point historique) le ton est donné : On est dans le vintage et dans le roots, le Rock’n Roll sans fioritures, the Real Thing, Man ! en découvrant, cette bête de scène (un renard, dixit Jano), seul sur les planches, s’escrimant sur sa Télécaster 1967 et sa grosse caisse, la bouche tordue par un rictus de jubilation et de concentration extrêmes. Comme à un début de concert, on sait que cette BD va le faire et qu’on va passer un bon moment.
L’histoire est courte et efficace comme un standard de Rockabilly. Un Rocker atypique, homme orchestre sans concessions, nommé King Automatic, écume la France profonde (et même la Pologne !) pour faire vivre ce bon vieux Rock’n Roll. En faisant le tri avec son frangin dans les vieilleries d’une tante récemment décédée, la découverte d’un Teppaz, d’un 45 tours de Rockabilly et d’une lettre le met sur la trace d’une Grand-Mère expatriée aux States. L’occasion est trop belle d’aller sur place faire une petite recherche généalogique. De là, les événements vont se précipiter, entre des flics un poil chelous, une Tata rockeuse et des p’tits voleurs à peine sortis du bac à sable. Baru est toujours aussi à l’aise dans la chronique sociale qui donne à ce scénario cette authenticité exempte de tout bavardage démonstratif. Sa narration sobre et aérée colle parfaitement au trait de Jano en lui permettant d’exprimer son talent pour les décors hauts en couleurs, tout aussi dépaysants qu’immersifs. Four RosesQu’il s’agisse d’un troquet de banlieue cradingue, d’une rue de Louisiane ou d’une salle des fêtes des Swinging Fifties des bases militaires franchouillardes où les Amerloques instillaient leur délicieux venin de décibels dans la caboche et les jambes des Frenchies, on y est. Et puis, c’est un pur plaisir de retrouver les tronches Rock’n Roll, avec ces regards perçants comme un cran d’arrêt, que seul Jano est capable de rendre aussi expressives. On sent qu’il s’est offert une cure de jouvence au travers de ces 74 planches, une première pour lui.
Cerise sur le Cheese-Cake, King Automatic et Johnny Jano (non, non, rien à voir mais le clin-d’œil est savoureux) dont la musique constitue le fil rouge du récit, ne sont pas des musiciens fictifs, comme en témoigne le 45 tours qui accompagne le livre. Du bien bel hommage et de la belle ouvrage. Jano is back, qu’on se le dise et vivement la suite !

Fugazi Music Club

Dessins et textes : Marcin PODOLEC

N’ayant pas pondu de chronique sur un nouvel album de BD Rock depuis un bout de temps, c’est avec un appétit vorace que j’ai jeté mon dévolu sur Fugazi Music Club, récit hautement prometteur, à commencer par le titre. Pour aller droit au but, la déception a été à la hauteur de l’attente. J’ai pour principe de ne pas parler de bouquins qui, à mon humble avis, ne méritent pas qu’on y consacre un peu de notre précieux temps de lecteur et d’auditeur déjà saturé par la surabondance de l’offre tant livresque que musicale. Mais la faim fait sortir le loup du bois et le chroniqueur affamé que je suis s’est résigné à ronger cet os aussi alléchant que sa moelle s’est révélée peu substantifique.
Le sujet était pourtant énorme : l’histoire vraie d’une bande de jeunes polonais désœuvrés qui, le mur de Berlin à peine tombé, se lancèrent à Varsovie, en 1992, dans l’aventure d’un club de Rock et firent monter pendant près d’un an sur les planches bancales d’un ancien cinéma, la fine fleur du http://ecsmedia.pl/c/fugazi-music-club-b-iext23121823.jpgRock polonais, s’ouvrant même aux formations Punk et Métal anglo-saxonnes et organisant un marathon de 21 jours de concerts. Se profilait la perspective d’anecdotes croustillantes, de moments de galères abyssales et de magie électrique ; des torrents de sueur et de bière emportant dans leur flot la passion d’une jeunesse étrennant grâce au Rock sa liberté toute neuve… Vous avez entendu parlé de la dimension narrative de l’espace inter-iconique ? Si on veut moins se la péter, on parle d’ellipse. Ben voilà, le récit de Podolec est une ellipse qui laisse au lecteur imaginer, entre les cases, combien cette saga a dû être passionnante. Le livre est parti d’une interview du principal protagoniste. L’auteur a mis cette interview en images… et puis voilà. L’histoire a beau être enthousiasmante, sans un brin de story-telling, de tension narrative, et là il y avait de quoi faire, cela débouche sur un enchaînement linéaire d’événements souvent confus où, par exemple, l’intervention de la pseudo-mafia qui avait financé le projet devient une anecdote comme les autres. Certains moments clés sont relatés en quelques dessins isolés et phrases lapidaires.
Passons à la limite sur le scénario mais quoi, il s’agit bien de Rock. Alors, ils sont où les Zicos ? On en voit dans 5 pages… sur près de 180 au total. La représentation des lieux est minimaliste, impossible d’avoir une représentation concrète de ce Club, si ce n’est les photographies à la fin du bouquin. Quand on voit comment Derf a fait revivre The Bank
Alors quoi, une daube de plus ? Objectivement, quoi que l’on pense de sa démarche ici, Marcin Podolec a du talent et ensuite, quand on s’intéresse vraiment au Rock énervé, ce pan méconnu de son histoire mérite malgré tout qu’on le soulève, même si le décor qui se cache derrière aurait pu être bien plus exaltant.

Serge Clerc – Intégrale Rock

Dessins et textes : Serge CLERC

En France, et même ailleurs dans le monde, rares sont les auteurs de bande dessinée dont l’œuvre fait immanquablement et quasi exclusivement penser au Rock, tant ce dernier a inspiré à ce point leur travail qu’il en est devenu la marque de fabrique. A la réflexion, il n’y en a pas plus que les doigts d’une main, comme aurait dit un célèbre héros de BD Homo Sapiens Sapiens blondinet dont le look n’aurait pas déparé comme front man d’un combo de Hair Metal des années 1980. Et encore, ce serait une main de yakuza qui aurait fait de sérieuses et récurrentes entorses à son code de l’honneur.
En fait, je n’en vois que deux. Mister Frank Margerin, dont on ne présente plus le Lucien et sa banane gominée la plus célèbre du Neuvième Art. Et puis il y a Serge Clerc. Ah là, tout de suite, y’en a qui font plus les malins, surtout chez les moins de trente ans. Il faut dire que le Sieur n’a pas connu le même succès populaire que son illustre pair. Cramps - ClercEt pourtant, hormis le fait que son talent l’eut sans doute mérité, Serge Clerc est l’un de ces piliers (oui, de comptoir aussi, lors de sa prime jeunesse, comme il l’avoue lui-même) qui ont fait rentrer la BD dans le monde du Rock, et réciproquement, à la glorieuse époque du magazine Métal Hurlant. Avec le déjà nommé Margerin et en compagnie, entre autres, des deux tandems Tramber/Jano, géniteurs de Kebra et Dodo/Ben Radis, heureux parents des Closh, Serge Clerc a mis du Rock dans les bulles, contribuant à faire de la BD un média aussi pour les adultes, mêmes attardés. Sauf qu’il a été le premier et qu’il n’est pas impossible qu’il soit le dernier.
Il suffit pour s’en convaincre de parcourir, en picorant ou bien en se goinfrant, les pages de cette Intégrale Rock. Juste un petite précision liminaire, le terme Intégrale est un poil fallacieux car tout ce que Serge Clerc a publié sur le thème n’est pas présent ici. Manquent notamment les récits composant l’album La Légende du Rock’n Roll. Mais la recherche de l’exhaustivité aurait fait basculer l’exercice de la Culture vers le Culturisme, vu les dimensions et le poids de cette donc presqu’Intégrale. On y trouve l’essentiel de la production de Clerc parue dans la presse musicale, notamment Rock & Folk et le New Musical Express, ainsi que dans Métal Hurlant, jusqu’à des publications récentes, comme cette évocation des Stranglers, extraite de Rock Strips. S’y ajoute le very meilleur de ses créations pour d’obscurs groupes ou musiciens, tels que Joe Jackson ou les Fleshtones (eh ouais, quand même). Le tout parsemé de dessins inédits.
Un parcours riche et foisonnant, à jamais marqué par l’empreinte du Rock et dont la genèse bien rock’n roll est retracée dans une longue préface convoquant les souvenirs de protagonistes qui ont mis le pied à l’étrier du « dessinateur espion », comme Philippe Manœuvre ou Jean-Pierre Dionnet. Jugez plutôt : Le jeune Serge envoie ses premiers dessins à l’Echo des Savanes à l’âge de 17 ans. Son talent précoce au service d’une passion immodérée pour la chose binaire lui vaut une publication immédiate. L’essai se répète plusieurs fois, notamment dans Métal Hurlant et Rock & Folk jusqu’à ce que l’éphèbe largue lycée (avant le Bac), parents et province natale pour se lancer dans le bouillonnement de la vie parisienne, dans un studio à la taille inversement proportionnelle à sa verve créatrice. C’est la période de l’explosion Punk puis New Wave, mouvements que pour une fois les Frenchies n’auront pas mis une décennie à importer et dont Serge Clerc sera le témoin privilégié, sur ses planches et aussi devant celles des salles branchées de Paris. On peut même affirmer qu’il en sera le graphiste officiel, tant la qualité et la justesse de ses dessins furent saluées par les journalistes, le public et même par les zicos qu’il a immortalisés. Stranglers - Clerc
De 1976 à 1982, en tant que pensionnaire VIP de Rock & Folk de Métal Hurlant bien sûr, mais aussi du New Musical Express, de l’autre côté de la Manche (à une époque où mettre « Rock » et « Français » dans la même phrase était un non-sens pour les Anglo-saxons), Serge Clerc croquera intensément dans les magazines toute la fine fleur de ce nouveau Rock : Groupes et fans dont il mettra en scène les mythes, les tendances et les codes, vestimentaires entre autres. Il sortira également quelques albums qui sont devenus des références de la BD Rock. Son style, au départ marqué par l’empreinte de Moebius, évoluera radicalement au contact d’Yves Chaland qui le mènera définitivement vers la ligne… claire (non, finalement celui-là, je vous le laisse).

Alors voilà, il ne reste plus qu’à vous installer confortablement dans votre canapé, sans oublier de retrousser vos manches (enfin un livre qui muscle autant les bras que le cerveau, surtout si on n’assume pas sa presbytie), mettre sur la platine le premier album des Clash, des Stranglers, des Cramps, de Blondie, des Sex Pistols, des Ramones… il sont tous là, puis mettre en route cette machine à remonter le temps en images, quand le Rock était encore révolutionnaire, rebelle, transgressif et qu’en écouter était un acte aussi militant qu’épicurien. Qui m’a traité de vieux con ? Y’a des coups de Docs size 10 dans le fondement qui se perdent !

L’interview de Serge Clerc, c’est ici